Maître Wang Xian : tigre ou dragon ?

Si Me Wang Xian est un peu hors de la norme, c'est d'abord parce qu'il a choisi de ne pas se conformer à certains usages, parce qu'il sort des sentiers battus. Cette attitude ne manquera pas d'en déranger certains, mais elle lui permet de se libérer de certains carcans traditionnels et d'innover. Ceci nous amène immédiatement à sa deuxième particularité : son appétit insatiable pour la recherche. Si sa façon d'exécuter les enchaînements classiques du tai-chi-chuan style Chen diffère autant de celle des autres maîtres de sa génération, c'est parce qu'il n'a pas hésité à apporter ses propres modifications à certains mouvements à la suite de ses recherches personnelles. Pour citer un exemple, il a ajouté à la première partie du mouvement 懒扎衣 (lǎn zā yī) une étape qui correspond à une désaisie des poignets. Quand il donne un séminaire, on peut fréquemment l'observer pendant les pauses en train de peaufiner un mouvement, de chercher comment l'améliorer ou comment mieux le transmettre à ses nombreux élèves. Sa générosité est en effet sans limite.

Ce qui le distingue également est sans aucun doute sa solide réputation martiale. Parmi les différents maîtres de sa génération, c'est peut-être celui qui a le plus mis l'accent sur l'efficacité martiale. Il a d'ailleurs élaboré un enchaînement en 48 mouvements, nommé 散手 (sǎn shǒu), qui concentre les techniques les plus redoutables issues de sa pratique de la "poussée des mains" (tuīshǒu). Même à bientôt 75 ans, la combattivité de ce tigre n'a pas faibli.

Mais une autre qualité essentielle le compare plutôt à un dragon qui nage : son art des déplacements. C'est sans aucun doute grâce à son non-conformisme, à son esprit d'innovation, et à ses compétences martiales, que Me Wang Xian a autant développé sa capacité à se déplacer souplement, avec légèreté et vélocité. Lors d'un récent stage en Espagne, tous les participants ont été témoins d'une scène amusante. Cherchant à corriger le mouvement 拗步 (ào bù) d'un stagiaire, il l'invita à s'écarter significativement de lui. En un éclair, il exécuta une enjambée qui lui permit d'entrer au contact de l'élève. Il s'écarta de nouveau et lui demanda alors de faire de même. Hélas, le pas de l'élève ne lui permit pas de s'approcher suffisamment. Le maître nous démontra cette technique à plusieurs reprises, preuve de son incroyable capacité à franchir rapidement les distances.

Ces quatre caractéristiques essentielles expliquent selon moi pourquoi ce maître inspire autant les pratiquants de tai-chi-chuan de Chine et d'Occident. Il ne s'agit pas ici de le mettre sur un piédestal, de voir en lui un modèle de perfection, car tout individu a ses failles. Il s'agit plutôt d'identifier les points où il excelle, de s'imprégner de son enseignement, pour parcourir son propre chemin.

Ma pratique repose très majoritairement sur l'enseignement de Me Wang Xian. Au cours de la saison, j'enseigne par exemple ses formes simplifiée (en huit mouvements) et explosive (en 48 mouvements). Merci de consulter le calendrier des cours à venir.