Compétition Europa Taichi 2018

Du vendredi 15 au dimanche 17 juin 2018 s'est déroulée la compétition Europa Taichi. Près de 200 participants français et étrangers étaient réunis dans un gymnase du 13e arrondissement de Paris pour des épreuves d'enchaînements individuels, en duos, en groupes, à mains nues ou avec armes, sans oublier le tournoi de tuishou. Voici mon témoignage sur cet évènement.

En premier lieu, pour bien comprendre comment est organisée cette compétition, il faut savoir que certaines épreuves regroupent des pratiquants de tous styles (notamment Yang et Chen), d'autres se limitent à un seul style (par exemple, Chen), et d'autres encore sont spécifiques à une variante d'un style (par exemple, Chen laojia/xinjia). Quand on appartient à une lignée authentique comme celle issue du village de Chenjiagou, on est souvent étonné de découvrir des compétiteurs pratiquant un style Chen à peine identifiable, bourré de fioritures et autres inventions. Les juges, ne connaissant pas (pour leur écrasante majorité) le style Chen, ne sanctionnent évidemment pas le non respect des catégories, et il n'y a pas d'autre choix que d'accepter ces conditions. Au passage, on ne peut que souhaiter que davantage de pratiquants de style Chen deviennent juges, pour apporter un regard différent sur les prestations des compétiteurs et séparer le bon grain de l'ivraie. Prenons l'exemple de l'épreuve de sabre style Chen. La forme du village de Chenjiagou est puissante, explosive, rapide, et très courte. Pourtant, j'étais le seul des quatre compétiteurs à l'exécuter de cette façon. Les autres avaient opté pour une forme lente ou même pour une chorégraphie qui n'avait qu'un lointain rapport avec le style Chen. Ils ont pourtant été récompensés. Ça fait partie des petites frustrations inévitables dans ce genre de compétitions. Il ne s'agit pas ici de mon cas personnel mais du non respect et de la non représentation de l'art martial authentique. Voici un second exemple qui illustre la difficulté de se présenter face à des juges. Dans l'épreuve en duo, ma partenaire Weijia (triple médaillée d'or en épreuves individuelles) et moi avons présenté une forme puisant dans le style Chen, combinant applications martiales et mouvements synchronisés (y compris des sauts et autres passages explosifs), dans un but à la fois martial et artistique. Il semble que le public ait été conquis par notre performance, mais nous ne sommes pas montés sur le podium. Pour les juges, c'était sans doute une prestation inédite et inhabituelle (pas exempte d'imperfections évidemment). Avec le temps, et si d'autres couples suivent notre exemple, ce type de forme en duo finira par être acceptée.

Une compétition de trois jours, c'est d'abord de longs moments à attendre son tour, à hésiter entre s'échauffer et répéter, au risque de se fatiguer voire de se blesser, et entre se refroidir et se reposer au risque de ne pas être prêt le moment venu. La présence d'amis est alors d'un grand réconfort, et de belles rencontres avec des pratiquants venus de tous horizons égayent aussi ces moments d'attente. Quand le gong sonne, il faut faire abstraction des regards scrutateurs des juges et du public et donner le meilleur de soi-même. Inévitablement, on perd une partie de ses capacités. C'est donc un exercice et une expérience intéressants. Il faut aussi trouver le bon compromis entre la prise de risque nécessaire (sauts et larges enjambées, positions basses ou en équilibre sur une jambe, etc.) et l'assurance de ne pas s'exposer à un déséquilibre, des tremblements, etc. Quand vient ensuite le moment de la remise des récompenses, il y a évidemment de la joie et de la tristesse, mais aussi un piège plus insidieux, celui de l'ego. En effet, la victoire flatte l'ego de façon démesurée, et la défaite blesse l'égo de manière injustifiée. Tels sont les sentiments humains, alors que l'équanimité devrait aplanir tout cela.

Pour finir, voici mon palmarès au terme de cette compétition :

• médaille d'or en forme lente style Chen (laojia/xinjia), hommes ;
• médaille d'or en forme rapide/explosive style Chen (toutes écoles), hommes ;
• médaille d'argent en forme à l'épée style Chen (toutes écoles), mixte.